Leonor Fini
Florian Mermin
accompagnés de photographies de Lee Miller

Le 26 juillet 1939, Leonor Fini vient visiter le Palais idéal du facteur Cheval. Dans le sillage d’une signature qu’elle dépose dans le célèbre le Livre d’Or du facteur Cheval et à travers l’émouvant témoignage d’une carte postale du Palais idéal qu’elle signe brièvement d’un « affectueux souvenir » à l’adresse de Paul et Nusch Eluard (venus deux ans auparavant avec Picasso et Dora Maar), se dévoile le lien intime qui a uni Palais idéal avec les avant-gardes artistiques à la veille de la Seconde guerre mondiale.
La visite de Leonor Fini au Palais idéal est alors la première étape d’une déambulation estivale qui l’emmènera en Ardèche chez Max Ernst et Leonora Carrington où elle retrouvera également Lee Miller, puis sur la côte Atlantique auprès de Gala et Salvador Dalí.
D’une audace radicale, l’œuvre de Leonor Fini traverse le siècle avec une liberté farouche. Représentations féminines ambivalentes, sphinx flamboyants, êtres métamorphes et mises en scène théâtrales peuplent un imaginaire où la beauté flirte avec l’inquiétude. Peintures, dessins et tapisseries convoquent des récits secrets où se déploient la force du corps, du désir et de la métamorphose. Le Palais idéal devient l’écrin rêvé de ces visions insoumises, entre clair-obscur et lumière rituelle.
L’exposition Le Sphinx et la Rose rend hommage à l’univers merveilleux et flamboyant de Leonor Fini qui se déployait chaque été durant près de 25 ans, chaque 30 août – date de son anniversaire – à l’occasion de bals aux mises en scènes fastueuses qu’elle imaginait à la lumière des bougies.
Florian Mermin vient visiter le Palais idéal pour la première fois en 2019, le jour de son anniversaire. Dans un dialogue parfait avec le monument du facteur Cheval, Florian Mermin présente un ensemble d’œuvres pensées comme autant de vestiges ou de fragments d’un rituel mystérieux, mais aussi d’une réflexion olfactive autour du parfum de la rose, élément clé du titre de l’exposition.
Dans l’exposition, la rose devient tout autant peinture que senteur. Elle est à la fois ornement et motif de sculpture. Nourri par les univers de Cocteau, Poe et combinant les univers de Leonor Fini et Ferdinand Cheval, Florian Mermin conçoit spécialement une sculpture inédite : un grand flacon de parfum sur lequel viennent se poser des papillons. Réhaussé d’épines de roses sur toute sa longueur, il repose sur des pattes de sphinx.



En convoquant l’odorat, l’artiste prolonge l’expérience sensorielle au-delà du regard et fait surgir des souvenirs, des intuitions, des présences invisibles. Le parfum de rose se diffuse depuis les bougies – produites spécialement par l’artiste – que supportent quatre appliques chandeliers. Leur modelage saisissant n’est pas sans évoquer la construction du Palais idéal à la lueur des bougies mais aussi les exubérantes soirées de Leonor Fini à Nonza, en Corse, dans un ancien couvent franciscain en ruines où elle s’est rendue chaque été pendant plus de 20 ans.
À travers un dialogue visuel et symbolique, l’exposition interroge ce qui persiste de l’énigme, du rite et du merveilleux dans l’art, du XXème siècle à aujourd’hui.
Lieu de création hors normes, né de l’imaginaire d’un seul homme, le Palais idéal du facteur Cheval se fait ici le théâtre de métamorphoses plastiques. Il accueille deux artistes dont on pourrait penser que tout les sépare — une époque, un médium, une histoire — mais qui se retrouvent réunis dans une exposition spectaculaire qui vient explorer les marges, faire vibrer les seuils, et troubler les frontières entre réel et imaginaire, humain et non-humain, vivant et inanimé.
Au terme de l’exposition, Le Sphinx et la Rose, Florian Mermin concevra un deuxième volet – cette fois-ci en solo – qui sera présenté jusqu’au 11 novembre 2025.